Lotario, une intrigue entre passion et histoire

Berengario, duc de Spoleto (Lombardie), ayant fait empoisonner le mari d'Adelaide, reine d'Italie, veut donner cette dernière à son fils Idelberto qui est amoureux d'elle, amour non payé de retour. Adelaide refuse cette union et, devançant les menaces de Berengario et de son épouse Matilde, se retranche dans sa forteresse de Pavie. Lotario (Otton), roi de Germanie, prend la tête d'une armée et marche sur Pavie afin de protéger Adelaide dont il est amoureux. Entretemps Berengario prend Pavie et fait emprisonner Adelaide. Cette dernière devra épouser Idelberto ou bien mourir. Berengario perd la bataille de Pavie, il est fait prisonnier par Lotario. Adelaide toujours prisonnière doit choisir entre la couronne ou le poison. Elle choisit le poison. Idelberto in extremis l'empêche de passer à l'acte mais elle lui dit qu'elle ne l'aimera jamais, décision acceptée par Idelberto qui promet à Adelaide respect et allégeance, à la grande fureur de sa mère, Matilde. Malgré la défection de Berengario, Matilde n'abandonne pas le combat et une nouvelle bataille entre Lotario et les troupes fidèles à Matilde a lieu et est gagnée par Lotario. Ce dernier entre dans le château, délivre Adelaide. Le sort de Berengario et de Matilde est entre les mains d'Adelaide qui leur pardonne. Lotario a gagné une bataille, a obtenu l'amour d'une reine. Par son union avec cette dernière, il devient roi d'Italie et allié du royaume de Bourgogne.

Händel ou Handel?

Opera seria baroque en langue italienne en trois actes
Lotario
HWV 26 est composé en 1729 pour 6 solistes et orchestre baroque.
Le livret est probablement de Giacomo Rossi, d'après l'Adelaide d'Antonio Salvi (1722)
Création le 2 décembre 1729 au King's Theatre (Haymarket) à Londres. Premier opéra de la "Deuxième Académie royale de musique" créée par G.F. Handel

Né le 23 février 1685 à Halle dans le Duché de Magdebourg (Saint-Empire germanique), Georg Friedrich Händel vit en région germanophone et en Italie jusqu'en 1712. Ensuite, il s'établit en Angleterre et change l'orthographe de son nom pour George Frideric Handel. Il meurt le 14 avril 1759 à Westminster, Londres.

Un concept artistique entre l’universel et l’unique

Fidèle aux intuitions qui ont présidé à la production de concerts de qualité ces dernières décennies dans et autour de l’Abbatiale, le concept artistique qui guide toute l’aventure de "L’Opéra de l’Impératrice" allie un respect des sources et une mise en valeur imaginative des lieux.

L’opéra baroque: la représentation des émotions

En choisissant de proposer au public en 2024 un opéra de Handel, l’équipe organisatrice rappelle les origines baroques et italiennes de l’opéra: parler en chantant pour mieux exprimer les affetti des protagonistes, re-présenter une histoire la plus expressive possible. Rendre présente Adélaïde au cœur de Payerne, c’est l’écouter nous chanter ses détresses, ses peurs, ses révoltes, son amour dans un lieu qu’elle a chéri. Voilà le but de l’œuvre, de l’opera in musica, hier comme aujourd’hui.

Les choix artistiques de l’utilisation d’instruments baroques, d’un soin aux ornementations et d'une exécution musicale historiquement informée, mais aussi du cadre, des costumes et des ambiances de mise en scène s’inscrivent dans cette conscience de l’héritage patrimonial si prégnante dans le centre historique de Payerne. Celle-ci n’empêche en rien les concepteurs de "L’Opéra de l’Impératrice" de recourir aux techniques modernes pour exprimer la poésie et les émotions de l’œuvre et la rendre unique dans ce cadre: Adélaïde nous rend visite du Xᵉ siècle, elle s’exprime en italien du XVIIIᵉ siècle et, auréolée par les projecteurs du XXIᵉsiècle, nous émeut aujourd’hui et résonne parfaitement avec l’actualité de la place des femmes dans notre société.

L’opéra baroque: entre mythologie et histoire

Les librettistes des opéras baroques puisent leurs sujets dans les mythologies ou les allégories pour parler à leurs contemporains, quitte parfois à les adapter pour les rendre plus dramatiques: Orphée, Didon et Enée, Ulysse… Le monde fantastique n’a pas de limite sur scène et les magiciennes côtoient les héros de sang royal dans des lieux enchantés où l’imagination vagabonde : c’est unspectacle des superlatifs.

Les principales exceptions à ce monde allégorique sont des sujets historiques, le plus souvent relatifs à des époques dont on ne sait tellement rien, qu’elles ont presque valeur de mythe. Telle est notre Adélaïde. Telle serait également la reine Berthe pour les Payernois, mais son opéra reste à écrire… Le propos de l’opera seria n’est pas la réalité des faits historiques. Ainsi, le livret de Handel n’hésite pas à créer des personnages de toute pièce, à leur donner des sentiments appropriés au drame, à projeter sur les scènes foule de détails imaginaires. Plus l’époque est méconnue, plus les libertés sont grandes. C’est cette marge de créativité et d’interprétation qui permet aussi aux artisans de "L’Opéra de l’Impératrice" de peindre ce que serait une Adélaïde payernoise et la faire parler aux cœurs des spectateurs contemporains.

L’opéra baroque: spectacle total, sur scène et dans les gradins

Un spectacle d’opéra, une "re-présentation", captive par la musique et la mise en scène. A Payerne, cela se vivra dans des lieux eux-mêmes chargés d’histoire. Il se vit également parce qu’il est un événement social et sociétal. Autrefois rendez-vous mondain où la (bonne) société se met en scène et conclut ses affaires, il est aujourd’hui encore occasion de tisser des liens et d’échanger points de vue ou cartes de visite. Le concept artistique se décline avant et après le spectacle, une fois de plus dans l’esprit des lieux habités: la production payernoise n’a ni les moyens, ni l’ambition de rivaliser avec les grandes maisons d’opéra et leur cadre inimitable, mais elle se veut au cœur d’une ville, en lien avec sa population, ses artisans et ses producteurs, pour la convivialité de la fête, sur les lieux mêmes où, dit-on, Adélaïde a jadis favorisé la prospérité